Audition du Ministre de l'Economie, de la Promotion des Investissements et la Prospective
PROJET DE LOI DE FINANCES POUR L’ANNEE 2015
PRESENTATION A L’ASSEMBLEE NATIONALE
Monsieur le Président de la Commission des Finances du Budget et de la Comptabilité Publique ;
Honorables Députés,
Conformément à l’article 41 de la loi organique n°0031/2010 relative aux lois de finances et à l’exécution du budget, j’ai l’honneur de soumettre à votre Commission, pour examen et approbation, le volet ressources du projet de loi de finances de l’année 2015.
Elaboré conformément aux dispositions de l’article 48 de la Constitution et de la règlementation en vigueur, le projet de loi de finances de l’année 2015 vise essentiellement l’accélération de la mise en œuvre du projet de société « l’Avenir en Confiance » du Président de la République Chef de l’Etat.
Il s’agit de mobiliser les ressources nécessaires au financement du PSGE notamment dans ses déclinaisons que sont la Stratégie Nationale d’Investissement Humain (SNIH), le Schéma Directeur National d’Infrastructures (SDNI) et la Stratégie Nationale d’ Industrialisation (SNI).
Dans ce contexte économique mondial relativement favorable, cette mobilisation des ressources exige une croissance forte, soutenue par des politiques et des réformes structurelles vertueuses.
Honorables Députés,
Ma présentation s’articulera autour de six (6) points essentiels
1. L’environnement économique international
2. Les perspectives économiques du Gabon pour l’année 2015 ;
3. Le cadre macro-économique ;
4. Les ressources de l’Etat pour l’exercice 2015 ;
5. La politique économique et fiscale et ; 6. La stratégie d’endettement de l’Etat pour 2015.
1- L’ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE INTERNATIONALE
Honorables Députés,
En 2015, la reprise économique mondiale se poursuivait avec une expansion de 3,8% contre 3,3% en 2014. Cette évolution découlerait de la reprise de l’activité dans la plupart des zones économiques et en particulier, dans les pays avancés et ceux émergents et en développement.
Cet affermissement interviendrait dans un contexte de relèvement des taux d’intérêt dans les principaux pays industrialisés, de baisse des cours du pétrole et d’amoindrissement des déficits publics dans de nombreux pays de l’OCDE.
En outre, le volume du commerce mondial (biens et service) progressait de 5,3%, contre 4% en 2014. En revanche, cette embellie ne s’accompagnerait pas d’un reflux significatif du nombre de demandeurs d’emplois.
A- La conjoncture dans les principaux pays avancés
Les principaux pays avancés afficheraient de meilleures perspectives économiques comparativement à 2014. Profitant de la consolidation de la demande, la croissance augmenterait à 2,3%, contre 1,8% en 2014.
Aux Etats-Unis, la baisse des incertitudes sur la politique budgétaire et l’amélioration du marché de l’emploi permettraient une relative pérennité de la reprise, qui se traduirait par une croissance du PIB estimé à 3,1% en 2015, contre 2,2% en 2014.
L’activité au Japon pâtirait de la hausse de la TVA qui plomberait la consommation et l’atonie de ses exportations. En conséquence, l’économie progressait de 0,8% en 2015, contre 0,9% en 2014.
Bénéficiant d’un retour progressif de la reprise mondiale et de sa demande intérieure, la croissance du PIB de la zone euro s’accélérait en 2015 et sortirait de fait de la récession. Ainsi, la hausse du PIB s’établirait à 1,3 contre 0,8% en 2014 et -0, 4 en 2013.
Au sein de la Zone, le PIB de l’Allemagne évoluerait de 1,4%, celui de la France de 1,0, l’Espagne 1,7% et l’Italie 0,8%.
B- La conjoncture dans les pays émergents et en développement.
En phase avec la reprise économique mondiale, la croissance des pays émergents et en développement demeurait solide. Ainsi, cet ensemble économique enregistrait une croissance de 5,2%.
Après une décélération en 2014 due aux tensions politiques, les pays émergents d’Europe profiteraient aussi du dynamisme de l’économie mondiale. En conséquence, le taux de croissance du PIB serait estimé à 2,1% en 2015, contre 0,9% en 2014. Au sein de ce groupe, la Russie et la Turquie atteindraient respectivement 1,0% et 3,7%.
Tirés par la Chine et l’Inde, les pays de l’Asie maintiendraient leurs performances en 2015. L’économie chinoise resterait robuste avec un taux de croissance de 7,1%. L’inde enregistrerait une croissance de 6,4 sur la période.
A l’instar des autres zones économiques, les pays d’Amérique latine, avec une hausse d’activité de 2,6%, profiteraient du raffermissement des échanges au niveau mondial. Par pays, le Brésil, l’Argentine et le Mexique afficheraient respectivement une croissance de 2%, 2,8% et 3,5%.
Au Moyen-Orient et Afrique du Nord, sous réserve d’un apaisement des tensions politiques, l’économie de la zone s’orienterait progressivement à la hausse (+4,8%).
L’Afrique subsaharienne confirmerait le dynamisme amorcé depuis plusieurs années. En effet la croissance pour cette zone en 2015 resterait au dessus de 5%.
Au niveau de la CEMAC, le redémarrage progressif des échanges au niveau mondial profiterait aux économies de la zone qui enregistreraient une croissance estimé au Gabon à 5,7%, 5,8% pour la République du Congo, 5,1 pour le Cameroun. Au sein de ce bloc économique, la Guinée-Equatorial verrait son PIB baisser à nouveau de 8,3% en 2015.
2- LES PERSPECTIVES ECONOMIQUES DU GABON POUR L’ANNEE 2015
Au niveau national, l’activité économique profiterait de cette dynamique de la croissance de l’économe mondiale et de l’amélioration au plan local de l’activité de certains secteurs. De même, le renforcement de l’activité économique serait favorisé d’une part, par l’accélération de l’exécution du Schéma Directeur National d’Infrastructure (SDNI), la mise en œuvre de la Stratégie Nationale d’Industrialisation (SNI), la prise en compte de la Nouvelle Stratégie d’Investissement Humain (Pacte Social) et d’autre part, par la poursuite des réformes structurelles engagées.
Du point de vue de l’offre, le secteur primaire s’inscrirait en baisse de 1,1% tandis que les secteurs secondaires et tertiaire progresseraient progressivement de 8,4% et 8,7%.
Le recul des activités du secteur primaire résulterait principalement de la contraction de la production pétrolière (-6,0%), malgré la bonne tenue de l’activité minière (9,5%).
La vigueur des activités du secteur secondaire proviendrait de la quasi-totalité des branches. L’activité de raffinage (+16,6%) l’Electricité et l’Eau (+8,5%), l’industrie du bois (+10,0) et le BTP (+8) étant les branches les plus dynamiques.
Enfin, les progrès enregistrés par le secteur tertiaire découleraient principalement des résultats obtenus par les branches transports et télécommunications (8,9%), services (+8,5) et commerce (+8,8%).
Du côté de la demande, l’activité serait soutenue par une demande intérieure tirée principalement par l’investissement (+13,4%) et l consommation privée (+7,2%) en dépit de la baisse des exportations de 1,1% liée au retrait es exportations de pétrole.
3- LE CADRAGE BUDGETAIRE POUR L’ANNEE 2014
Honorables Députés,
En considérant cet environnement économique internationale favorable, les hypothèses retenues pour le cadre macro-budgétaire du Gabon ont été arrêtées comme suit :
La production de pétrole brut devrait s’établir à 10,250 millions de tonnes contre 10,910 millions en 2014, soit un recul de 6,0% en raison du vieillissement des champs matures. Ce recul serait atténué par les productions additionnelles tirées des travaux de redéveloppement d’Anguille (Total Gabon), ainsi que les forages et des work over (Maurel & Prom et Vaalco).
Dans le même temps, le cours moyen du baril du pétrole gabonais connaitrait une baisse de 20% par rapport au niveau projeté dans la LFI 2014, pour situer, 80 dollars US. Par contre, le taux de change du dollar américain par rapport au FCFA augmenterait légèrement de 2,1% à 490 FCFA.
En ce qui concerne les mines, la production serait marquée parla consolidation de la production de Comilog, de celle du gisement de Ndjolé, de NOGA Mining ainsi que la mise en exploitation du complexe métallurgique de Moanda (C2M). Ainsi, la production nationale de manganèse se situerait autour de 4,610 millions de tonnes, soit une hausse de 9,7%. Elle passerait de 4,2 millions de tonnes en 2014 à 4,6 millions de tonnes. Le prix de vente de la tonne devrait également augmenter de 2,5% à 229,2$/t.
De même, la production de l’or se stabiliserait autour de 1 200 kilogrammes pour un cours évalué à 1350$ l’once.
Dans ce contexte, le Gabon enregistrerait une croissance de 5,7% en 2015, contre 5,1 projetée à fin 2014. Cette bonne performance proviendrait essentiellement du dynamisme du secteur hors pétrole, malgré la baisse prévue de la production pétrolière.
Le secteur hors pétrole afficherait une croissance de 7,7% en 2015 contre 6,2% en 2014. Celle du secteur pétrolier serait en revanche en recul de 6% contre -0,6% prévue en 2014.
Par ailleurs l’inflation serait contenue à 2,3% en deçà de la norme communautaire.
4- LES RESSOURCES DE L’ETAT POUR L’EXERCICE 2015
Monsieur le Président de la Commission des Finances du Budget et de la Comptabilité Publique ;
Honorables Députés,
Avant de vous présenter l’estimation des ressources de l’Etat pour l’année 2015, permettez-moi de vous faire à mi-parcours de l’exécution à fin août 2014 sur le volet ressource.
A fin août 2014, l’ensemble des ressources budgétaires mobilisées s’élève à 1741 milliards de FCFA, sur une prévision de 2954,7 milliards de FCFA dans la LFR 2014 soit un taux de réalisation de 59%.
Ces ressources comprennent 1620 milliards FCFA de recette propres et 121 milliards de FCFA de ressources d'emprunt liées au financement des projets.
S’agissant tout d’abord des ressources propres, elles comprennent 725,4% milliards de FCFA de recette pétrolières (hors SOGARA) et 894,4 milliards de recette hors pétrole.
Au niveau de recettes pétrolières, les effets de la fermeté du prix du pétrole ont été annihilés par la poursuite du déclin des champs vieillissants et la baisse du taux de change du dollar américain sur les huit (8) premiers mois de l’année. Ainsi, les recettes pétrolières ont été recouvrées à hauteur de 725,4 milliards de FCFA représentant 66% des prévisions. Elles se répartissent ainsi qu’il suit :
• Impôts sur les sociétés : 89,2% milliards de FCFA ;
• Redevance (RMP) : 269,5 milliards de FCFA ;
• Contrat de partage : 347,1 milliards de FCFA ;
• Autres recettes pétrolières : 19,9 milliards de FCFA ;
Par ailleurs, les transferts à la SOGARA se sont élevés à 83,8 milliards de FCFA pour une prévision annuelle de 114,6 milliards de FCFA, soit 73% des prévisions.
Concernant les recettes hors pétrole, elles enregistrent un taux de réalisation de l’ordre de 68,1% sur la période, pour s’établir à 894,6 milliards de FCA. Ce niveau est obéré notamment par les performances réalisées par les recettes de porte.
• Les recettes douanières atteignent 244 milliards de FCFA, soit 57% des prévisions ;
• Les impôts directs s’élèvent à 259,7 milliards de FCFA soit 67% des prévisions ;
• La TVA s’est établi à 208,1 milliards de FCFA, soit 72% des prévisions.
S’agissant ensuite des ressources d’emprunt, ces dernières concernent uniquement les prêts pour les projets d’investissements. A fin aoûts 2014, les tirages sur les financements extérieurs sont exécutés à hauteur de 45,6% des prévisions initiales. Ils sont en hausse de 38,3 milliards de FCFA par rapport à août 2013, pour se situer à 121 milliards de FCFA.
Honorables Députés,
En tenant compte de la présentation succincte des ressources sur les huit (8) premiers mois de l’année et des hypothèses du cadrage macroéconomique, le niveau des ressources pour l’année 2015 se chiffraient à 3073,3 milliards de FCFA contre 2993,5 milliards de FCFA de ressources propres et de 783,7 milliards de FCFA des ressources d’emprunt.
Les ressources propres comprennent 1.376,3 milliards de FCFA de recettes fiscales et 913,4 milliards de FCFA de recettes non fiscales.
Concernant les recettes fiscales, elles passent e 1 489,8 milliards de FCFA à 1 376,3 milliards de FCFA, soit une baisse de 113,5 milliards de FCFA (-7,6%). Cette baisse est essentiellement imputable à l’impôt direct de 659,1 milliards de FCFA dans la LFR 2014 0 529,8 milliards de FCFA (-129,4 milliards de FCFA).
Par contre, les droits et taxes sur la propriété, les droits et taxes de douanes et des autres recettes fiscales seraient orientés vers la hausse.
Les ressources hors fiscale afficheraient également un recul de 22,8 milliards de FCFA. Elles passeraient de 1183,7 milliards de FCFA à 913,4 milliards de FCFA. Elles se composent essentiellement des revenus de la propriété et des prises de participation de l’Etat.
S’agissant des ressources d’emprunt, s’établiraient à 783,7 milliards de FCFA. Elles incorporent 207,3 milliards de FCFA de tirage sur les projets et 576,4 milliards de FCFA d’émissions de titres publics 490,1 milliards de FCFA sur le marché financier international. Ces emprunts seront destinés à l’accélération de la mise en œuvre du Schéma Directeur Nationale des Infrastructures.
5- LA POLITIQUE ECONOMIQUE ET FISCALE
Monsieur le Président de la Commission des Finances du Budget et de la Comptabilité Publique ;
Honorables Députés,
Le projet de loi de finances 2015 que j’ai l’honneur de vous présenter, met en exergue la volonté du Gouvernement de conduire parallèlement aux grands projets d’investissements structurants contenus dans le Schéma Directeur Nationale des Infrastructures, une politique active sur le plan social afin de répondre aux besoins socioéconomiques de base des populations.
C’est pourquoi, en dehors de l’objectif d’un taux de croissance à deux chiffres recherché dans le secteur hors pétrole, le Gouvernement s’atèle à rendre cette croissance inclusive pour atteindre l’objectif de prospérité partagée déclinée dans le Plan stratégique Gabon Emergent.
A cet effet, le Gouvernement entend, à travers le présent budget, renforcer les actions en faveur des populations fragiles par le financement du pacte social.
S’agissant de la politique fiscale et douanière, plusieurs dispositions du Code Général des Impôts ont été modifiées. Celles du Code et Tarif des Douanes de la CEMAC actuellement en vogueur restent inchangées.
Sur les dispositions du Code Général des Impôts, les changement portent sur :
• Le champ d’application de l’impôt sur les bénéfices et les revenus ;
• L’impôt sur les personnes physiques ;
• La taxe sur la valeur ajoutée ;
• Les droits d’accises;
• La Redevance d’usure de la route ;
• La taxe sur les jeux de hasard ;
• Les droits d’enregistrement ;
• Les obligations des contribuables ;
• Le contrôle de l’impôt ;
• Les sanctions fiscales ;
• Le régime fiscal des fusions de sociétés et opérations assimilées.
6- LA STRATEGIE D’ENDETTEMENT DE L’ETAT POUR 2015
Durant la période 2015-2017, le plafond annuel des nouveaux emprunts, en pourcentage du Produit Intérieur Brut est fixé à 12,7% en 2015, 8,8% en 2016 et 4,5% en 2017, soit une moyenne de 8,7% sur la période.
Pour 2015, la stratégie d’endettement serait marquée par une forte présence du pays sur le marché. Cette position tient de la décision du Gouvernement d’utiliser ses marges d’endettement en plus de ses ressources propres et des apports des partenariats publics-privés afin de hisser ses capacités de financement à hauteur des besoins nécessaires à l’accélération de la mise en œuvre du programme de société du Chef de l’Etat. La hausse de recours à l’emprunt passerait particulièrement par une intervention plus active sur les marchés financiers international et régional. Cette orientation se poursuivrait durant les années 2016 et 2017.
Les financements mobilisés auprès des bailleurs bilatéraux, multilatéraux et commerciaux ainsi que les fonds levés sur le marché financier permettraient, tout d’abord, de poursuivre la mise en œuvre du programme routier national.
Ils serviraient aussi à renforcer la capacité de production et de distribution de l’énergie électrique dans les trois pôles de production des régions de l’Estuaire, du Sud et du Nord du pays à travers la construction de barrages hydro-électriques.
Les efforts porteront également sur le renforcement du circuit de production et de distribution d’eau, notamment les travaux de renforcement de la centrale de Ntoum et la mise à niveau des circuits de canalisation.
Enfin, ces ressources contribueraient à l’élargissement de la base productive, notamment à travers les filières agro-industrielles.
Les emprunts extérieurs devront respecter les caractéristiques suivantes :
• Les dettes multilatérales auront une maturité moyenne comprise entre 17,0 et 20,0 ans, assortie d’un différé d’amortissement d’au moins 5,0 ;
• Les dettes bilatérales auront une maturité moyenne comprise entre 18,0 et 20,0 ans et une période de grâce d’au moins 4,0ans ;
• Les crédits acheteurs auront une maturité moyenne de 8,0 ans et un délai d’au moins 2,0 ;
• Les emprunts obligataires seront émis à remboursement à échéance (in fine) avec une maturité d’au moins 10,0ans.
Afin de se couvrir contre le risque de refinancement, les dettes commerciales ne devront pas excéder le seuil de 32,0% des nouveaux engagements extérieurs hors emprunt obligataire international.
En ce qui concerne la maitrise du risque de taux d’intérêt, le portefeuille des nouveaux emprunts sera composé au minimum de 25,0% d’engagements à taux d’intérêt variables.
Telle est Monsieur le Président de le Commission de Finances, du Budget et de la Comptabilité Publique, Honorables Députés, l’économie du projet de la loi de finances 2015 soumis à votre examen.
Je vous remercie.
Régis IMMONGAULT